Le groupe centriste au Sénat a décidé de porter une proposition de loi visant à conditionner le mariage au fait « que les deux futurs époux soient en situation régulière sur le territoire français. » En tant que cheffe de file des Écologistes sur ce dossier je pèse de tout mon poids pour que le naufrage idéologique des centristes ne vienne pas polluer le code civil.

En effet, des arguments particulièrement nauséabonds sont avancés par les centristes dans l’exposé des motifs de ce texte :  « L’absence de titre de séjour valide, le refus de titre de séjour régulier, ainsi qu’une obligation de quitter le territoire français, doivent pouvoir empêcher la tenue d’une union républicaine (…) il est essentiel qu’un aspirant au mariage réside sur le territoire français de façon régulière. »

De fait cette proposition est une grave tentative d’atteinte aux droits fondamentaux. Une stigmatisation non dissimulée des personnes étrangères, avec l’immonde suspicion que la plupart des mariages impliquant un étranger, se font par intérêt. Pire, il ne s’agit même plus avec ce texte de lutter contre les mariages blancs ou gris, mais bien de lutter contre tous les mariages mixtes et trouver un nouveau moyen de réduire les droits des personnes n’ayant pas la nationalité française, dans la continuité de la loi immigration.

Un biais xénophobe qui vise à porter atteinte à la liberté matrimoniale des couples binationaux, des couples étrangers résidant sur le territoire français et franco-étrangers. Ces couples souffrent déjà de stigmatisation, tout comme les enfants issus de ces unions. Les propos du Premier Ministre Bayrou sur le métissage ou sur la submersion migratoire accréditant les thèses d’extrême droite le rappellent honteusement.

Dans certaines situations auxquelles les Français·es établi·es à l’étranger peuvent être particulièrement confronté·es, il prive tout simplement le droit au mariage, si celui-ci n’est pas accordé sur le territoire français. C’est le cas notamment lorsque l’un·e des conjoint·es vient d’un pays en guerre ou bafouant le respect des droits humains, où l’homosexualité serait criminalisée.

De plus, cette proposition provoque aussi une rupture d’égalité entre les couples franco-étrangers au sein de l’Union européenne – qui pourront continuer à se marier en France sans besoin de demande de séjour – et ceux qui n’en font pas partie et sont dans l’obligation d’effectuer une démarche et obtenir une autorisation à occuper le territoire.

Cette discrimination touche finalement les personnes de nationalité françaises elles-mêmes, puisqu’elle ne seraient plus égales face à la liberté d’épouser qui elles souhaitent.

En tant que sénatrice écologiste des Français·es de l’étranger je suis particulièrement révoltée par cette volonté délibérée de discriminer. C’est pourquoi j’ai porté purement et simplement la suppression de ce texte en commission des lois au Sénat.

Il va sans dire que cette tentative de modification du code civil est inconstitutionnelle. En effet, les fondements du mariage en droit français reposent sur la notion du consentement libre et éclairé des deux époux. Pas sur un critère de résidence ni de nationalité.

La liberté matrimoniale, qui comprend la liberté de choisir son conjoint, est une liberté fondamentale, à valeur constitutionnelle protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789. C’est aussi une liberté protégée par le droit européen et de l’Union Européenne (CEDH et CDFUE) lequel affirme la protection de la vie affective et sexuelle et les droits de se marier et du respect de la vie familiale.

Les propositions sur la régularisation de l’immigration s’enchaînent, toujours plus xénophobes, inhumaines et discriminantes les unes que les autres. La suspicion et la peur dictent des mesures inutiles, injustes et infaisables, véhiculant des idées pourtant loin de la réalité.

Nous écologistes continuerons de nous opposer avec toutes nos forces aux idées rances, aux fantasmes morbides, aux obsessions xénophobes, aux imaginaires racistes de toutes celles et ceux qui ont fait de la haine des étrangers la valeur cardinale de leur projet politique.